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Actualité juridique

Surveillance des salariés par l’IA : jusqu’où l’employeur peut-il aller légalement ?

Manager RH consultant des données de performance issues d’un logiciel d’intelligence artificielle en entreprise
17 avril 2025

Introduction
L’intelligence artificielle (IA) s’invite de plus en plus dans la gestion des ressources humaines, promettant gain de temps et efficacité. Mais à l’heure où certains outils permettent un suivi permanent et ultra-précis de l’activité des salariés, une question cruciale se pose : jusqu’où l’IA peut-elle surveiller sans enfreindre le droit du travail et la vie privée des employés ? La réponse se joue désormais autant sur le terrain juridique que technologique.

Le cadre juridique de la surveillance au travail
La surveillance des salariés est encadrée par plusieurs textes, notamment le Code du travail et le Règlement général sur la protection des données (RGPD). Selon l’article L.1222-4 du Code du travail, « aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance ».

En matière de données personnelles, le RGPD impose à l’employeur une obligation de transparence, de proportionnalité et de finalité légitime. Concrètement, tout traitement automatisé de données (comme l’analyse d’activité via l’IA) doit être justifié, déclaré à la CNIL, et les salariés doivent être informés de manière claire et compréhensible.

La jurisprudence est également claire : la mise en place d’un dispositif de surveillance implique une information préalable, une consultation des représentants du personnel (CSE) et un usage proportionné au but recherché.

Jurisprudence récente : les limites posées par les juges
Dans un arrêt du 10 novembre 2021 (Cass. soc., n° 20-12.263), la Cour de cassation a rappelé qu’un système de surveillance généralisée non déclaré ne peut produire de preuves recevables en justice. En l’espèce, un employeur avait utilisé un logiciel de contrôle sans en informer clairement les salariés : les preuves issues de ce logiciel ont été écartées par les juges.

Autre point de vigilance : la jurisprudence invalide régulièrement les dispositifs jugés trop intrusifs, comme la surveillance constante via webcam ou les enregistrements de frappe clavier (keyloggers), qui portent une atteinte disproportionnée à la vie privée des salariés.

Conséquences pratiques pour les employeurs
Les outils d’IA peuvent être des alliés précieux en matière de gestion du temps ou de prévention des risques, à condition d’en faire un usage raisonné. Les employeurs doivent impérativement :

• Informer les salariés de manière claire et documentée
• S’assurer que le traitement des données est justifié et proportionné
• Éviter tout dispositif de surveillance permanente ou dissimulée
• Consulter le CSE avant déploiement d’un outil de contrôle
• Tenir un registre des traitements (RGPD)

Faute de quoi, les données recueillies pourront être jugées illicites et les employeurs exposés à des sanctions civiles, voire pénales.

Le conseil de l’avocat
L’usage de l’intelligence artificielle dans le suivi des salariés doit s’accompagner d’un cadrage juridique rigoureux. Pour éviter tout risque contentieux, nous recommandons :

  • D’auditer régulièrement les outils RH pour vérifier leur conformité

  • De rédiger une note d’information dédiée aux salariés précisant la finalité des outils utilisés

  • D’impliquer le DPO (délégué à la protection des données) et les représentants du personnel dès la phase de réflexion

  • De privilégier des solutions d’IA éthiques et transparentes, dont les algorithmes sont explicables

Références juridiques

  • Code du travail, art. L.1222-4

  • Règlement général sur la protection des données (RGPD)

  • Cass. soc., 10 novembre 2021, n° 20-12.263

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